Après ses études doctorales en France au début des années 1960, le professeur Cheikh Anta Diop avait entrepris la création du laboratoire Carbone 14 de l’IFAN de l’Université de Dakar. L’objectif était de réaliser une échelle complète de chronologie permettant de dater les évènements depuis l’origine des temps cosmiques datant de 5 milliards d’années, âge de l’univers. Il dirigea le laboratoire de 1966 à 1986.
Le professeur Cheikh Anta Diop avait très tôt compris que l’introduction des techniques nucléaires d’avant-garde dans un pays sous-développé posait des problèmes de moyens financiers énormes. Il a voulu donc travailler dans le domaine des basses énergies, accessibles aux pays sous-développés et isolés.
La méthode de datation par le carbone 14 était la méthode la plus utilisée par le professeur cheikh Anta Diop. Cette méthode présente un grand intérêt par la variété de ses applications telles que :
- Les méthodes de détections des raies par coïncidence et par anti coïncidence ;
- La spectrométrie de masse ;
- La technique du vide ;
- Les émulsions nucléaires.
Il fallait diversifier les activités du laboratoire pour qu’il devienne un centre des faibles radioactivités permettant « d’acclimater » un ensemble de techniques de pointe avec des moyens relativement modestes.
Largement soutenu par le professeur Théodore Monod, Directeur de l’IFAN à cette époque, puis remplacé en 1964 par M. Vincent Monteil qui avait continué l’œuvre entamée par son prédécesseur, le projet de mise en place d’un laboratoire a pris forme en 1966. Ce laboratoire a joué un rôle pionner dans la sous-région par son dynamisme jusqu’au début des années 1980.
Les méthodes de datation du laboratoire carbone 14
Comme déjà évoqué, parmi les méthodes de datation en vigueur, celle du carbone 14 était la plus utilisée par le professeur Cheikh Anta Diop. Elle est dite de période courte, car elle va du paléolithique supérieur (40.000 ans) à nos jours.
Elle est la méthode privilégiée pour retracer « l’histoire de l’Humanité » au sens large, car l’homo sapiens stricto sensu, en plus de sa morphologie typique, est le seul à avoir vécu au paléolithique supérieur. Par une démonstration scientifique, l’Afrique reprenait ainsi sa place dans l’histoire de l’Humanité. D’autres méthodes utilisées à l’époque était celle du Potassium 40/ Argon 40 (5 milliards -1 milliard) ou la méthode Uranium / Thorium qui permettait de remonter le temps et descendre le plus bas possible. Elle a permis de déterminer l’âge de l’univers, notamment l’âge de toute la matière des galaxies et du cosmos et la datation des roches lunaires telles que les tectites, les météorites, etc.
En paléontologie humaine, cette méthode a permis de montrer le caractère monogénétique de l’humanité et a permis de circonscrire son origine en Afrique de l’Est, dans la région des Grands Lacs.
Dans le même sillage, la méthode fondée sur la polarisation rotatoire (méthode non radioactive) avec le benzène a aussi permis de remonter jusqu’aux âges sub-contemporains, en plus de la mesure d’activité du tritium d’intérêt hydrogéologique ou hydro-chronologique.
La réhabilitation
L’activité du laboratoire s’est arrêtée complètement en 1986, année de la mort de Cheikh Anta Diop. Après treize ans d’inactivité, le gouvernement décide de la réhabiliter par la restauration des lieux et l’acquisition d’un nouvel équipement tel que le compteur a scintillation liquide (Tricarb 3170TR/SL) muni de BGO permettant de réduire le bruit de fond jusqu’à 0.1cpm. L’utilisation de ce compteur est multiple car en dehors de la datation on peut étudier la pollution atmosphérique. Dans le sens des objectifs tels qu’ils décrites par le professeur cheikh anta Diop un spectromètre alpha a été installé pour étudier la pollution marine.
Les premières nouvelles datations commencèrent, cependant, en 2003 après une calibration du compteur par les échantillons fournis par l’Agence International pour l’Énergie Atomique et par l’Université Paris VI.
Sous la houlette du Pr Maurice Ndèye, chercheur spécialisé en physique nucléaire, la mise en place des méthodes réalisées actuellement dans le laboratoire et la calibration des appareils de mesure ont été faites en collaboration avec le CNRS et le CEA de Gif/Yvette à Paris. Fort de cette impulsion, le laboratoire participe régulièrement aux rencontres scientifiques et s’est distingué de 2003 à 2018 par des présentations scientifiques aux différentes conférences organisées dans les villes de Wellington, d’Oxford, d’Hawaï, de Paris, de Dakar et de Trondheim.