Station expérimentale du Laboratoire de traitement des eaux usées (LATEU)
De la fosse septique à la production de légumes et agrumes
Le laboratoire de traitement des eaux usées de l’IFAN Cheikh Anta Diop expérimente l’arrosage des plantes avec des eaux usées traitées. Ainsi, 570 litres d’eau traités par jour ont permis d’irriguer 47 m² de planches de laitue et 71 m² de planches de menthe pour une production moyenne annuelle de 353 Kg de laitues et 134 kg de menthes sans aucun apport supplémentaire d’engrais, d’après les résultats préliminaires de l’étude en cours. Cette étude relève, toutefois, un certain niveau de contamination en coliformes fécaux de la laitue et de la menthe. cependant si elles sont lavées selon les normes de l’Organisation Mondiale de la Santé, elles peuvent être parfaitement propres à la consommation
La Station Expérimentale d’Épuration (STEEP) des eaux usées du LATEU-IFAN, installée depuis 2003, s’était fixée entre autres objectifs de constituer un équipement pédagogique afin de proposer un outil de développement de solutions basées sur la nature pour traiter les eaux usées et de contribuer à une meilleure gestion des ressources hydriques de notre pays en proposant des eaux usées traitées pouvant être utilisées dans l’agriculture y compris dans la production de plantes fourragères.
En effet, dans les pays sahéliens comme le Sénégal à régime pluviométrique très faible (3 à 4 mois de pluies dans l’année) et à dominance agricole avec 70% des actifs, les eaux usées traitées peuvent soutenir ce secteur primordial pour l’économie. Aujourd’hui, sur le plan de l’assainissement, près de 70 % de la population sénégalaise utilisent des fosses septiques pour gérer les eaux usées. Mais la fosse septique n’est qu’un ouvrage de stockage qui assure le pré-traitement. Une fois pleine, elle doit être vidangée. Les boues sont ainsi dépotées dans une station de traitement des boues de vidanges de fosses septiques (STBV). Cependant, si la filière de la partie solide de ces boues de vidanges est maîtrisée au Sénégal (avec Delvic Sanitation, une entreprise privée qui gère les STBV et qui produit sur le marché un compost de qualité à partir des boues traitées), la partie liquide n’a pas encore trouvé une solution de traitement durable.
La STEEP du LATEU s’est donc investie dans cette problématique en collaboration avec les autorités en charge de la gestion des eaux usées du Sénégal (Direction de l’Assainissement, ONAS, Delvic Sanitation). Aussi, depuis quelques temps, la station reçoit un dépotage régulier de camions de vidange.
Les toilettes du LATEU étant également connectées à la STEEP, ses eaux usées sont traitées et servent à arroser des fleurs, des arbres fruitiers et à faire des tests expérimentaux sur la laitue et la menthe.
La STEEP reçoit une charge hydraulique journalière de 1500 litres d’eaux usées répartis entre cinq filières de traitement démarrant chacune par un bassin à microphytes. Les résultats préliminaires d’une étude en cours montrent que la station produit 570 litres d’eaux traitées par jour qui permettent d’irriguer jusqu’à maturité 47 m2 de planches de laitues et 71 m2 de planches de menthes pour une production moyenne annuelle de 353 Kg de laitues ou 134 kg de menthes sans aucun apport supplémentaire d’engrais. Au niveau des rendements épuratoires, la baisse de la pollution organique varie entre 75 et 94%, en fonction des filières. La quantité de bactéries (coliformes fécaux) baisse également, même s’il y a encore une marge de progression tandis que la réduction des œufs de parasites est de 100%. Par ailleurs, sur le plan des nutriments, l’eau traitée journalièrement renferme jusqu’à 48 g d’azote, 18 g de phosphore et 20 g de potassium (NPK), ce qui en fait un engrais naturel.
Sur le plan de la qualité des plantes cultivées, malgré la baisse, on note encore aussi bien au niveau de la menthe que de la laitue, un certain niveau de contamination en coliformes fécaux.
Mais si, avant consommation, ces légumes sont lavés à l’eau de javel comme le conseillent les normes OMS, ces produits pourront être parfaitement utilisés pour la consommation humaine. En ce qui concerne la contamination parasitaire, aucun œuf viable n’a été noté sur les légumes récoltés. Afin de produire une eau de bonne qualité pour l’arrosage des plantes, le LATEU envisage de collecter et de traiter l’ensemble des eaux usées de l’IFAN Ch. A. Diop. En effet, une estimation grossière des eaux usées produites par l’IFAN Ch. A. Diop peut donner une quantité proche de 2500 litres par jour, ce qui reste encore dans les capacités de traitement de la STEEP. Les eaux traitées pourraient servir à assurer l’autonomie pour l’arrosage des espaces verts de l’IFAN Ch. A. Diop et permettre ainsi d’économiser l’eau potable utilisée pour l’arrosage dans ce contexte de pénurie d’eau à Dakar.