Cheikh Anta Diop, un chercheur entre défi scientifique et courage de la vérité

L’une des intuitions scientifiques fut de montrer la place prééminente du continent africain dans l’histoire de la civilisation, ou dans l’histoire de l’humanité tout court. Sachant que l’ambition est une chose et la démarche ressorts théorico-méthodologique une toute autre chose, Cheikh s’est évertué à concilier les deux. Autant dire que son obsession à démontrer l’antériorité de la civilisation nègre n’a jamais frisé l’ « afrocentrisme contemplatif » que lui prêtèrent quelques-uns de ses contradicteurs, car un défi scientifique aussi titanesque devait à ses yeux, payer le prix d’une structuration pluridisciplinaire voire d’un dispositif de recherche qui soit au confluent des approches les plus diverses. De là découle toute la circulation à l’intérieur d’univers scientifique qu’un arbitraire découpage académique et un cloisonnement administratif travaillaient à séparer et à opposer, de façon rigide et systématique. Il parvint ainsi à concilier la démarche des sciences sociales (Sociologie, Anthropologie, Linguistique), celle des sciences historiques (Histoire, Archéologie) et celle des sciences expérimentales (Physique, Chimie, Biologie).  C’est la dimension totale de l’homme, qui est envisagée dans les travaux de Cheikh Anta.

Avec la mise sur pied en 1966, du Laboratoire Carbone 14, Cheikh Anta se proposait d’appréhender  l’histoire de l’homme à partir de la reconstitution paléontologique, autrement dit de la datation des fossiles archéologiques au radiocarbone. Il pensait là, avoir trouvé la voie idéale pour aborder l’histoire ancienne sur une base scientifique. C’est ainsi qu’il a commencé à utiliser les techniques nucléaires, en l’occurrence la Physique et la Chimie nucléaires des basses énergies, c’est-à-dire les éléments radioactifs de longue durée. En utilisant la méthode de la datation Carbone 14, il a réalisé qu’il pouvait obtenir des résultats tangibles tels que la datation de la période de sortie des premiers hommes vers l’Europe via le détroit de Gibraltar. Seulement,  cette technique ne pouvait pas aller au-delà de 40.000 ans. Or les évènements les plus déterminants de l’évolution historique s’étendent sur une période beaucoup plus longue. Il faudrait dès lors des techniques autres pour optimiser le mode de datation. C’est ainsi qu’il a pensé nécessaire de mobiliser la chaîne Potassium Argon ; un dispositif qui permet de prendre en charge des évènements qui remontent à plusieurs milliards d’années lumières, tels que la naissance de la terre qui remonte à 4 milliards d’années lumières. C’est ce dispositif qui lui permit d’affirmer que le peuplement de la planète s’est fait suivant un axe sud-nord et non l’inverse. Ce renouvellement de perspective a apporté  une plus-value à la vie de l’IFAN en contribuant à son rayonnement international. Défi scientifique certes, mais défi éthique également. Défi éthique car il s’agissait de prouver de la façon la plus rigoureuse possible, que les topoï africains avaient une valeur philosophique et scientifique propre, et que le Continent noir n’avait pas à développer un complexe d’infériorité, à douter sur son identité culturelle et à minorer son statut sur le plan des apports à la civilisation universelle. Il est inutile de rappeler que Cheikh Anta s’est résolument engagé dans les rapports de force intellectuels de son époque, dans l’art de la contradiction scientifique et dans celui de la controverse amicale des gens de la communauté du savoir ». Cependant, il n’est superflu de dire qu’il l’a fait au nom d’un admirable « courage de la vérité » autrement dit d’un « parrêsia[1] » qui procède d’une abnégation à porter ses idées, de la hardiesse et de la pugnacité à proposer des arguments inédits et novateurs dans la disputatio, et de la disposition à « souffrir » parce que minoritaire dans ses convictions, de la témérité à faire les frais d’un engagement scientifique quand bien même on aurait en face tout un establishment politico-scientifique.

Auteurs :

Cheikh Abdoulaye Niang (Laboratoire d’Anthropologie Culturelle, IFAN)

 Ibrahima Sagna (Laboratoire Carbone 14, IFAN)


Visite de Son Excellence, l’Ambassadrice du Royaume Uni

Le Directeur de l’Institut fondamental d’Afrique noire Cheikh Anta Diop, Pr Abdoulaye Baila Ndiaye, a reçu ce mercredi 21 Septembre 2022 une délégation de l’ambassade du Royaume Uni de la Grande Bretagne au Sénégal. Dirigée par Son Excellence l’ambassadrice Juliette John, cette visite entre dans le cadre d’une tournée de prise de contact à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Les discussions ont porté autour des problématiques de recherche intéressant les deux institutions. Des axes de collaboration future ont aussi été évoqués.

La malnutrition, les politiques de protection sociale et les sciences au cœur des activités de recherche du LARTES-IFAN

Dans ce présent article, le laboratoire de Recherche sur les Transformations économiques et sociales de l’Institut fondamental d’Afrique noire de l’Université Cheikh Anta Diop, LARTES-IFAN, passe en revue ses différentes activités de recherche menées au courant du deuxième trimestre 2022. Au menu, la malnutrition sous toutes ses formes chez les femmes à Pikine, les résultats d’une étude approfondie sur l’impact, l’efficacité et la durabilité financière des politiques de protection sociales, entre autres.

Le Laboratoire de Recherche sur les Transformations économiques et sociales de l’Institut Fondamental d’Afrique noire de l’Université Cheikh Anta Diop (LARTES-IFAN), en collaboration avec l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD), mène depuis quelques années des projets de recherche sur l’alimentation au Sénégal, notamment dans les zones urbaines, comme Dakar. 

Le LARTES-IFAN a ainsi organisé une formation pour l’étude « Malnutrition sous toutes ses formes chez les femmes à Pikine ». Cette formation s’est déroulée du 16 au 21 mai 2022, et a été assurée par les chercheurs du LARTES et de l’IRD.

Le but de ce projet de recherche est d’étudier les problèmes de santé liés à l’alimentation et au mode de vie chez les femmes de plus de 20 ans, vivant en zone urbaine. Approximativement 500 femmes dans l’arrondissement de Pikine Dagoudane ont participé à cette étude. En outre, en collaboration avec deux consortiums de la société civile, OSCAR (Organisation de la Société Civile pour la Recherche Action) et REPROSOC (Renforcer la société civile pour une protection sociale efficace) notamment, une étude approfondie sur l’impact, l’efficacité et la durabilité financière des politiques de protection sociale au Sénégal, a été menée. Cette étude couvre les départements de Fatick, Kédougou, Ranérou, Rufisque et Sédhiou, et vise à évaluer les programmes de protection sociale mis en œuvre au Sénégal. À ce titre, les connaissances produites serviront à formuler des recommandations visant à nourrir le dialogue entre les parties prenantes ainsi que le plaidoyer pour une meilleure utilisation des ressources disponibles et une stratégie de financement pérenne.

Une autre étude sur la Vulnérabilité nutritionnelle et l’abordabilité en Afrique de l’Ouest (Focus Sahel) par PAM s’est aussi inscrite au programme du deuxième trimestre.  Elle a été le fruit d’une collaboration entre le Bureau régional du PAM et le LARTES-IFAN. L’objectif est d’analyser les potentiels facteurs influençant le fonctionnement des marchés, et en particulier, les déterminants de l’abordabilité surtout dans le contexte sahélien et, dans une moindre mesure, dans d’autres contextes.

Promotion des sciences exactes…

À travers le Programme ICAN KIX, une évaluation Commune en Mathématiques et en Lecture, Le LARTES-IFAN, en partenariat avec le Réseau « People Action for Learning (PAL) », a conduit une évaluation des aptitudes des enfants en mathématiques et en lecture dans le cadre d’un projet appelé « ELANA » (Évaluation de langue, de l’alphabétisation et de la numération précoce). Le projet vise à évaluer les compétences des enfants âgés de 4 à 10 ans en préscolaire et en début de primaire. L’outil harmonisé sera mis en œuvre par les organisations membres du Réseau PAL dans 12 pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique. L’évaluation est implémentée de manière digitale, avec l’utilisation de tablettes et une application conçue pour le projet. La collecte de données, après trois tests pilotes, est prévue dans le 3e trimestre 2022, et le rapport à la fin de la même année. L’évaluation sera également adaptative, permettant une estimation large et précise des compétences des enfants.

Appel à contributions pour le Bulletin de l’IFAN, série B (Sciences humaines),

 Le Bulletin de l’IFAN, série B (Sciences humaines), lance un appel à contribution d’articles pluridisciplinaires pour le tome LXII (1-2) à paraître en 2023. 

Fondé en 1939, le Bulletin de l’IFAN publie des articles originaux ou de synthèse, des notes et documents et des comptes rendus bibliographiques sur des sujets relatifs à l’Afrique noire et spécialement l’Afrique noire occidentale, dans les différents domaines des sciences de la Vie et de la Terre pour sa série A et dans ceux des sciences humaines pour sa série B. 

Ces études sont généralement rédigées en français, mais peuvent l’être en anglais ou éventuellement en allemand, espagnol, italien, ou portugais. Dans les autres cas, une traduction en français ou en anglais sera nécessaire. 

Les articles (bibliographie comprise) ne devront pas dépasser 30 pages en interligne simple. La police recommandée est Times New Roman, corps 12. Les notes de bas de pages seront traitées dans la même police de caractères, corps 10. 

Un résumé doit figurer obligatoirement en début d’article, rédigé par l’auteur dans la langue de publication de l’article. Il doit contenir les principaux éléments de l’étude, surtout ceux qui n’apparaissent pas dans le titre, en particulier son objet, sa méthodologie, les principaux éléments apportés et les conclusions essentielles. 

À la suite du résumé dans la langue de publication doit figurer un résumé dans une autre langue de communication internationale (français ou anglais) précédé du titre traduit dans cette langue ; ce résumé peut être plus long et plus complet que le résumé dans la langue de publication. 

Des mots-clés doivent être mentionnés après les résumés, de façon à pouvoir intégrer l’article dans les systèmes internationaux de bases de données. 

Chaque article comportera des subdivisions avec des titres et sous-titres courts en minuscules. La hiérarchie entre les différents niveaux de titres doit être très claire. 

Les citations sont placées entre guillemets doubles et insérées dans le corps du texte, lorsqu’elles sont courtes. Si elles atteignent au moins quatre lignes, elles sont placées en retrait. Toute citation, directe ou indirecte, doit être référencée. 

Les citations de seconde main ne sont pas admises. 

Les références sont incorporées dans le texte, selon le système auteur-date sans ponctuation, entre parenthèses, comme suit : 

(Fall 1980) et, en cas de renvoi à la page : (Fall 1980 : 118) ou (Fall 1980 : 117, 120, 130). 

Dans le corps du texte, le nom est présenté en minuscules, à l’exception de l’initiale en majuscule : Vernant ; Vidal-Naquet ; Diop. 

Les notes de bas de page seront numérotées de façon continue. Il est conseillé d’éviter l’excès de notes (en nombre ou en longueur). 

En dehors des sigles, aucun mot ne doit être écrit en capitales, même au niveau des titres. Il est demandé de ne pas mettre de point ni d’espace après chaque lettre (exemple : IFAN et non I. F. A. N.). 

Les majuscules initiales doivent être réservées au début des phrases et aux noms propres ou considérés comme tels (et aussi aux noms communs en allemand) et elles seront accentuées, le cas échéant (À, Â, É, È, Ê, Ô, etc.). 

Aucun texte ne doit être soumis s’il a déjà été publié ou s’il est en instance de l’être dans une autre revue. Les manuscrits reçus sont soumis à un comité de lecture qui a pour mission de juger leur contenu aux points de vue de leur valeur scientifique et de l’opportunité de leur publication par l’IFAN. Les auteurs sont informés de la décision prise par ce comité. La rédaction se réserve la possibilité de procéder à des retouches dans le texte et à des suppressions dans les tableaux et illustrations. 

Une bibliographie sera attachée à chaque contribution, et devra être présentée comme suit. 

Présentation bibliographique (dans l’ordre alphabétique, uniquement) 

1) ouvrages imprimés, à présenter comme suit, à l’exclusion de toute autre mention 

a) ouvrage en 1 vol. 

FOURNIER, N. (1998). Grammaire du français classique. Paris : Belin. 

b) titre générique d’un ouvrage et titre propre d’un volume 

GURVITCH, G. (1969). La vocation actuelle de la sociologie, t. 1, Vers la sociologie différentielle. Paris : PUF. 

c) contribution à un ouvrage collectif 

THILMANS, G. (1997). « Puits et captiveries à Gorée aux XVIIe et XVIIIe s. » : 107-120, 5 ill., in : D. Samb (ed.) Gorée et l’esclavage. Dakar : IFAN Ch. A. Diop. 

2) Mémoire ou thèse (norme AFNOR Z44-050, simplifiée) 

NGOM, P. M. (1995).- Caractérisation de la croûte birimienne dans les parties centrale et méridionale du supergroupe de Mako.- Th. État : Géol. : UCAD de Dakar.- 243 f. 

3) Article 

CASTER, F. (1964). « Les réseaux modernes », Géographie urbaine XII (9) : 234-289, 11 fig., 3 ill., 1 carte. 

Les contributions sont à envoyer à : publications.ifan@ucad.edu.sn et seront publiées dans le Bulletin de l’IFAN, série B, LXII (1-2) 2023 

Date limite de soumission : 31 décembre 2022

L’IFAN Ch. A. Diop et l’Université d’Évry réfléchissent à des axes de collaboration

Une délégation de l’université d’Évry a été reçue à l’Institut fondamental d’Afrique noire Cheikh Anta de Diop du 27 au 28 mai. Les enjeux de la conservation et de la valorisation du patrimoine africain ont été au centre de deux jours d’échanges avec les services du Département de l’information scientifique de l’IFAN Ch. A. Diop et la délégation conduite par son président, Pr Patrick Cumi

Les Services des Archives, de la Publication, de la documentation et de l’Audiovisuel, ont tour à tour, exposé les fonds documentaires dont ils disposent, présenté leurs missions respectives ainsi que les contraintes et défis de la préservation de ce patrimoine. À la suite, une visite guidée a été organisée sous la conduite du Directeur de l’IFAN Ch. A. Diop, le Pr Abdoulaye Bailla Ndiaye.

« Pendant ces deux jours, on a eu à faire l’état des lieux et à échanger sur les perspectives de collaboration en termes de conservation et de valorisation. On a senti un certain intérêt de la part de l’université d’Évry. Ce qui est un réel motif de satisfaction, compte tenu de l’importance de ces fonds pour nous, pour les communautés d’origine et pour la communauté scientifique en général », a indiqué le Directeur. Pour le président de l’université d’Évry, Pr Patrick Cumi, cette visite a également répondu aux attentes. 

« On pressentait que cette visite allait, à la fois, nous permettre de découvrir un univers de données et d’informations qui sont précieuses à un moment où on a besoin de réconcilier l’homme avec l’homme dans sa diversité, mais aussi l’homme dans une harmonie avec la nature. On habite une maison commune qui, aujourd’hui, est quand même assez menacée. Et, ce que l’on a découvert ici, c’est qu’il y’a un ensemble de fonds documentaires écrits de la main de l’homme, des résultats de recherche scientifique, des fonds photographiques et sonores ainsi que des témoignages qui sont tout à fait originaux et inédits ; d’autres qui viennent en complémentarité de ceux qui existent dans le monde.  À l’université d’Évry, on a eu cette volonté qui perdure de mettre en valeur la richesse de l’histoire africaine, à travers les usages, les connaissances, la façon dont on respecte sur la longue durée, la terre qui nous nourrit et puis il y a les connaissances autour des plantes, du sous-sol, etc. L’IFAN Ch. A. Diop concentre tout cela. » 

L’IFAN Ch. A. Diop et l’université d’Évry partagent la même sensibilité à préserver ces documents et à valoriser les savoirs émanant de ces fonds qui constituent un legs pour les générations futures. Les discussions vont se poursuivre pour identifier précisément les axes de collaboration afin de mieux sauvegarder ce patrimoine en vue d’une exploitation scientifique. 

Station expérimentale du Laboratoire de traitement des eaux usées (LATEU)

De la fosse septique à la production de légumes et agrumes

Le laboratoire de traitement des eaux usées de l’IFAN Cheikh Anta Diop expérimente l’arrosage des plantes avec des eaux usées traitées.  Ainsi, 570 litres d’eau traités par jour ont permis d’irriguer 47 m² de planches de laitue et 71 m² de planches de menthe pour une production moyenne annuelle de 353 Kg de laitues et 134 kg de menthes sans aucun apport supplémentaire d’engrais, d’après les résultats préliminaires de l’étude en cours.  Cette étude relève, toutefois, un certain niveau de contamination en coliformes fécaux de la laitue et de la menthe. cependant si elles sont lavées selon les normes de l’Organisation Mondiale de la Santé, elles peuvent être parfaitement propres à la consommation 

La Station Expérimentale d’Épuration (STEEP) des eaux usées du LATEU-IFAN, installée depuis 2003, s’était fixée entre autres objectifs de constituer un équipement pédagogique afin de proposer un outil de développement de solutions basées sur la nature pour traiter les eaux usées et de contribuer à une meilleure gestion des ressources hydriques de notre pays en proposant des eaux usées traitées pouvant être utilisées dans l’agriculture y compris dans la production de plantes fourragères.

En effet, dans les pays sahéliens comme le Sénégal à régime pluviométrique très faible (3 à 4 mois de pluies dans l’année) et à dominance agricole avec 70% des actifs, les eaux usées traitées peuvent soutenir ce secteur primordial pour l’économie. Aujourd’hui, sur le plan de l’assainissement, près de 70 % de la population sénégalaise utilisent des fosses septiques pour gérer les eaux usées. Mais la fosse septique n’est qu’un ouvrage de stockage qui assure le pré-traitement. Une fois pleine, elle doit être vidangée. Les boues sont ainsi dépotées dans une station de traitement des boues de vidanges de fosses septiques (STBV). Cependant, si la filière de la partie solide de ces boues de vidanges est maîtrisée au Sénégal (avec Delvic Sanitation, une entreprise privée qui gère les STBV et qui produit sur le marché un compost de qualité à partir des boues traitées), la partie liquide n’a pas encore trouvé une solution de traitement durable.

La STEEP du LATEU s’est donc investie dans cette problématique en collaboration avec les autorités en charge de la gestion des eaux usées du Sénégal (Direction de l’Assainissement, ONAS, Delvic Sanitation). Aussi, depuis quelques temps, la station reçoit un dépotage régulier de camions de vidange. 

Les toilettes du LATEU étant également connectées à la STEEP, ses eaux usées sont traitées et servent à arroser des fleurs, des arbres fruitiers et à faire des tests expérimentaux sur la laitue et la menthe.

La STEEP reçoit une charge hydraulique journalière de 1500 litres d’eaux usées répartis entre cinq filières de traitement démarrant chacune par un bassin à microphytes. Les résultats préliminaires d’une étude en cours montrent que la station produit 570 litres d’eaux traitées par jour qui permettent d’irriguer jusqu’à maturité 47 m2 de planches de laitues et          71 m2 de planches de menthes pour une production moyenne annuelle de 353 Kg de laitues ou 134 kg de menthes sans aucun apport supplémentaire d’engrais. Au niveau des rendements épuratoires, la baisse de la pollution organique varie entre 75 et 94%, en fonction des filières. La quantité de bactéries (coliformes fécaux) baisse également, même s’il y a encore une marge de progression tandis que la réduction des œufs de parasites est de 100%. Par ailleurs, sur le plan des nutriments, l’eau traitée journalièrement renferme jusqu’à 48 g d’azote,     18 g de phosphore et 20 g de potassium (NPK), ce qui en fait un engrais naturel.

Sur le plan de la qualité des plantes cultivées, malgré la baisse, on note encore aussi bien au niveau de la menthe que de la laitue, un certain niveau de contamination en coliformes fécaux.

Mais si, avant consommation, ces légumes sont lavés à l’eau de javel comme le conseillent les normes OMS, ces produits pourront être parfaitement utilisés pour la consommation humaine. En ce qui concerne la contamination parasitaire, aucun œuf viable n’a été noté sur les légumes récoltés. Afin de produire une eau de bonne qualité pour l’arrosage des plantes, le LATEU envisage de collecter et de traiter l’ensemble des eaux usées de l’IFAN Ch. A. Diop. En effet, une estimation grossière des eaux usées produites par l’IFAN Ch. A. Diop peut donner une quantité proche de 2500 litres par jour, ce qui reste encore dans les capacités de traitement de la STEEP. Les eaux traitées pourraient servir à assurer l’autonomie pour l’arrosage des espaces verts de l’IFAN Ch. A. Diop et permettre ainsi d’économiser l’eau potable utilisée pour l’arrosage dans ce contexte de pénurie d’eau à Dakar.

CAMARA LAYE-PENSIONNAIRE DE L’IFAN

Camara Laye intégra l’IFAN en 1966 à la faveur d’une bourse d’étude attribuée par le président sénégalais Léopold Sédar Senghor. Il fut d’abord admis au laboratoire d’histoire avant de poursuivre sa carrière scientifique au laboratoire des langues et civilisations africaines. Professeur Yves Person l’encourageait poursuivre son travail de transcription et de traduction des bandes de l’épopée de Soundiata Keita entamé en Guinée. Camara Laye travaillait ainsi sous la direction de Professeur Liliane Kesteloot, contribuant ainsi à la sauvegarde des récits sur l’Afrique racontés par les griots. Cette entreprise l’occupa pleinement durant ces dernières années de vie alors que sa santé était devenue vacillante.

Né en 1928 à Kouroussa en Guinée, Camara Laye est issue d’une lignée de forgerons. Après des études primaires inachevées , il s’orienta vers la professionnalisation et   réussit son certificat d’aptitude professionnelle en mécanique. Il eut ensuite une bourse d’étude en France pour une spécialisation. Mais « faute d’avoir pu s’inscrire dans un établissement scolaire, Camara Laye se retrouve ouvrier des usines Simca », peut-on lire dans le bulletin 175 des Notes Africaines qui retrace les principales étapes de sa vie. Camara Laye fait la connaissance d’une française,  professeur de lettres à Paris. Cette rencontre donna naissance à son premier roman L’enfant noir (1953), autobiographie dans laquelle l’auteur raconte l’histoire, les péripéties de sa vie dans un style imagé et pittoresque. Ce livre est un condensé des mémoires de Camara Laye. De son enfance dans une petite ville de la Haute Guinée en passant par le métier de bijoutier de son père qu’il doit perpétuer, les pouvoirs spirituels de sa mère, les croyances traditionnelles et son goût prononcé pour les études, L’enfant noir est considéré comme un chef d’œuvre de la littérature africaine. Avec cet ouvrage, il obtint le prix Charles Veillon en 1954. L’enfant noir est étudié dans les programmes scolaires au Sénégal et en Guinée

Le regard du roi (1954) est le deuxième roman de Camara Laye. Celui-ci a divisé les critiques sur l’authenticité de cet ouvrage mystique dont les référentiels reposent sur la culture Mossi. Le regard du roi évoque le cheminement spirituel d’un blanc délaissé par ses semblables, qui tente d’accéder à la sagesse africaine.

En 1958, Camara Laye est nommé directeur du crédit du Congo après un passage à la caisse centrale de la France d’Outre-Mer qui formait les cadres des agences de crédit d’Afrique noire. Lorsque la Guinée eut son indépendance, il est affecté au Ghana comme ambassadeur par le président Sékou Toure. Il occupa plusieurs postes à l’étranger avant d’être rappelé pour diriger l’Institut National de la Recherche et de la Documentation en Guinée ex   IFAN, afin de continuer son travail de recherche sur le Mande.
En conflit ouvert avec Sékou Touré, Camara Laye a vécu une brève expérience carcérale. A sa sortie de prison, il s’installa en Côte d’Ivoire puis au Sénégal en 1965. Une année plus tard, sortit son troisième ouvrage Dramous (1966), une critique acerbe du régime guinéen.

 Au Sénégal, dans les années 70, en dépit d’une hypertension artérielle tardivement diagnostiquée, Camara Laye finit ses recherches sur l’épopée de Soundiata Keita et publia l’ouvrage Le Maitre de la parole (1978).

 Il s’agit d’une transposition et d’une réécriture de l’épopée de Soundiata Keita que Camara Laye a mis une vingtaine d’années à collecter auprès des griots, gardiens de la mémoire en Afrique.

Camara Laye décédera deux ans plus tard, en 1980.  Il repose aux cimetières de Yoff.  Dans son allocution prononcée à Dakar lors de ses obsèques, Amar Samb, ancien directeur de l’IFAN parlait de lui en ces termes : «   romancier de talent, poète, ami affable, Laye Camara entre dans le panthéon des hommes de lettres (…), il est mort mais pas son œuvre littéraire marquée du sceau de l’originalité ».

REFERENCES

Kestelot, L (Juillet 1982). Témoignages sur Camara Laye. Revue Notes Africaines No 175, 58-59

Ño ko bokk Salon de discussion des savoirs sur l’Afrique

Le mot wolof, Ño ko bokk, est une interlocution qui célèbre ce qui est en partage entre différentes parties prenantes. C’est, ici, ce Salon de discussion sur des savoirs sur l’Afrique que nous souhaitons, ensemble, créer, inspirer et nourrir. Ce lieu de rendez-vous est bimensuel et nous réunira, à chaque deux mercredis, entre 12h30 et 13h00. En ces temps de d’inconfort globalisé dans les espaces classiques d’exercice de nos métiers, Il s’agit donc pour nous, d’ouvrir des espaces de refuge dans lesquels nous cultivons la nécessité de ne pas désespérer de l’Académie, de l’urgence à réengager le goût de débattre sous le double mode de la critique et de l’universel. Bien au-delà donc de l’idée simple d’une opportunité de présenter ses travaux, notre salon de discussion est une construction collective d’un service à la communauté qui s’offre sous la forme d’un espace d’échange et d’apprentissage. Nous nous intéressons aux savoirs sur l’Afrique, à leurs histoires, leurs actualités, leurs enjeux multiples, à travers une variété large d’entrées thématiques touchant aux divers aspects notionnels, conceptuels, théoriques et méthodologiques que pose la production des savoirs sur l’Afrique. 

Organisateurs

Les organisateurs du programme sont Fatoumata Hane (Université Assane Seck, Ziguinchor), Mouhamed Abdallah Ly (Ifan-Cheikh Anta Diop, Dakar) et Abdourahmane Seck (Université Gaston Berger, Saint-Louis)

Le programme est soutenu par le Groupe d’Action et d’Étude Critique – Africa (GAEC-Africa), le Pôle d’Observation et d’Etude sur la Migration et l’Environnement (POEME-IFAN) et l’Institut Education, Famille, Santé et Genre (IESFG/ UASZ).  

Modalités

1- Chaque rendez-vous est modéré et comprend, outre l’exposition sur le thème en 15 minutes du présentateur, une séance de conversation entre lui et l’audience. 

2- 15 jours à l’avance, une courte biographie du présentateur, le titre, le résumé (150 mots Max), ainsi qu’une bibliographie sélective seront partagées sur le mailing-list. Le rappel est fait une semaine avant la présentation et 24h avant. 

Instructions

1- Il est vivement souhaité une observation collective et solidaire de règles de base qui seront rappelées à chaque début de séance. 

2- Couper les micros et les caméras et, pour intervenir, prendre le soin de vérifier que son environnement sonore est adéquat 

3- Ne pas monopoliser la parole et tenir les interventions claires, précises et pas plus longues que deux minutes pour permettre à tout le monde de pouvoir participer au débat. 

4- Les débats sont enregistrés, mais uniquement à des fins de constitution de ressources pédagogiques, librement accessibles sur le site du GAEC-Africa.

Résumé de présentation 

Notre contribution interroge l’évolution de la place des femmes dans l’espace politique sénégalais postindépendance. En partant de la présidence de Léopold Sédar Senghor, marquée par un fort nationalisme politique, une centralisation du pouvoir, puis une ouverture démocratique qui consacre le pluralisme politique, elle analyse toutes les configurations politiques postindépendance (période du parti unique, ouverture politique, wolofisation, entrée des acteurs internationaux, alternance politique, parité) pour montrer comment s’y imbriquent à la fois des dynamiques d’exclusion et d’inclusion politiques des femmes. 

Elle montre comment la construction élitiste du pouvoir politique, qui renforcer la position dominante des hommes (« évolués » puis technocrates), contribue à l’exclusion politique des femmes. Cette configuration institue surtout une division sexuelle du travail politique. Elle montre aussi dans quelles mesures les transformations sociales, politique et culturelles (wolofisation, loi sur la parité etc.), le développement du mouvement feministe et l’intérêt progressif des organisations internationales à l’égalité de genre depuis les années 1980 permettent une féminisation de l’espace politique sans pour autant remettre en cause les rapports de pouvoir entre les hommes et les femmes, y compris dans l’espace politique. 

Ainsi les politiques de quotas, la constitutionnalisation de la parité, la mise en place de mécanismes de promotion de la femme, bien qu’elles permettent une féminisation des instances dirigeantes (Assemblées locales et nationale), montrent leurs limites quant à la transformation des rapports de genre aussi bien dans l’espace privé que dans l’espace public. Les résistances sociales et religieuses au féminisme confortent l’ineffectivité des dynamiques émancipatrices. Ce qui conduit à ce qu’on pourrait appeler une « dissonance égalitaire ». 

Biographie de l’auteur 

Saliou Ngom est socio-politiste, chercheur à l’IFAN. Il est diplômé de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne où il a soutenu sa thèse en 2017 au centre d’études de science politique et de sociologie (CESSP). Il a également été coordonnateur de la recherche dans le programme LPT du ministère de l’éducation, financé par l’USAID, entre 2019 et 2020. 

L’oeuvre d’Abdoulaye-Bara DIOP en débat

Le Bulletin de l’IFAN Ch. A. Diop, série B lance un appel à contribution en hommage au Pr Abdoulaye Bara Diop

Abdoulaye-Bara Diop a été le véritable grand maître et fondateur de la sociologie sénégalaise. Ses anciens étudiants occupent, de nos jours, des positions importantes dans l’enseignement, la recherche ou les fonctions gouvernementales au Sénégal comme ailleurs en Afrique. Les publications de cet enseignant-chercheur, connu pour sa grande humilité, sa discrétion et sa droiture morale, font partie du patrimoine le plus important de l’université sénégalaise en raison de leur originalité réflexive ou hétérodoxe, de la solidité de leurs fondements et de la précision de leurs résultats. Cette œuvre magistrale, déjà saluée par de nombreux commentaires, a été forgée sur la longue durée. Elle a été dominée par des publications exceptionnelles par leur qualité. Elle a constitué une séquence majeure dans la production de la « grande bibliothèque » relative à la vie de notre pays. Abdoulaye-Bara Diop incarne l’art de la recherche fondamentale. Il a abordé diverses problématiques d’études. 

L’itinéraire d’un brillant chercheur hétérodoxe

Né le 19 août 1930 à Saint-Louis, il a effectué ses études primaires dans cette ville. Entre 1948 et 1953, il fréquente la célèbre École normale William Ponty, à Sébikotane. À la suite d’une année de propédeutique à l’Institut des Hautes Études devenu, plus tard, l’Université de Dakar, il entame, en 1954, des études à l’Université de Toulouse. En 1958, il obtient une licence de psychologie et de sociologie. Il détient également le certificat de philosophie et le DES de sociologie. En 1958, de retour au Sénégal, il est recruté à l’IFAN, alors dirigé par Théodore Monod. En 1959, il est nommé assistant titulaire. Il prépare sa thèse de doctorat de troisième cycle qu’il soutient avec brio en 1964. Il est maître-assistant en 1968. En 1979, Abdoulaye-Bara Diop soutient sa thèse de doctorat d’État en sociologie à l’Université de Paris-Sorbonne, sous la direction de Georges Balandier. Il sera le premier sociologue professeur titulaire de l’Université de Dakar. Il se consacre alors entièrement à l’enseignement et à l’encadrement de ses doctorants africains.

Entre 1986 et 1995, il dirige l’Institut fondamental d’Afrique noire Cheikh Anta Diop. Admis, en 1995, à faire valoir ses droits à la retraite, il poursuit néanmoins ses enseignements à la Faculté des Lettres et Sciences humaines. Il est également sollicité par ses collègues pour participer à des jurys de thèse au Sénégal, mais aussi dans d’autres pays africains et en Europe.  

Sa sensibilité politique de gauche l’a rapproché d’Abdoulaye Ly, grande figure intellectuelle, politique et morale du Sénégal contemporain (alors directeur adjoint de l’IFAN), d’Amadou Mahtar Mbow, d’Assane Seck et d’autres universitaires et patriotes africains de renom. C’est en reconnaissance de ses qualités intellectuelles et morales que la présidence de la Commission scientifique des Assises nationales du Sénégal lui a été confiée. Par ailleurs, tout le monde sait le rôle important qu’il a joué au sein de  la Commission nationale de réforme des institutions (CNRI) qui a produit – le fait mérité d’être souligné – le meilleur rapport disponible dans le pays en matière de réforme des institutions.

Il a obtenu de nombreuses distinctions, parmi lesquelles le titre de professeur honoraire de la Faculté des Lettres et Sciences humaines de l’UCAD, d’Officier de l’Ordre du Mérite de la République du Sénégal, de Chevalier des Palmes académiques de la République française, de Chevalier de la Légion d’honneur de la République française. 

Un pionnier des études sur les migrations

Le succès de ses livres sur les Wolof a tendance à occulter son œuvre fondatrice sur les migrations. Avant l’indépendance du pays, il a lancé une grande enquête sur la migration toucouleur à Dakar dans le cadre des recherches de la Mission socioéconomique du Sénégal (MISOES). Cette enquête a été effectuée, entre avril 1958 et mars 1959, dans les centres urbains. Ses résultats avaient fait l’objet d’un premier rapport. Il en tirera une thèse de troisième cycle en 1964. C’est à partir de cette base solide qu’il a encouragé ses étudiants à s’intéresser aux migrations sereer et joola. Il a conduit, avec ses partenaires, des programmes de recherche en y insérant certains de ses étudiants. En 1996, il a édité, en collaboration avec Philippe Antoine (démographe à l’ORSTOM devenu IRD), le livre au titre évocateur La ville à guichets fermés : Itinéraires, réseaux et insertion urbaine, IFAN-ORSTOM, 1995, 363 p.

Deux ans plus tard, il a rédigé la préface de l’ouvrage sur L’insertion urbaine à Dakar et à Bamako, dans le cadre d’un partenariat entre le CERPOD (Centre d’études et de recherche sur la population pour le développement), l’IFAN Ch. A. Diop (Institut fondamental d’Afrique noire Cheikh Anta Diop), l’ORSTOM (Institut français de recherches scientifiques pour le développement en coopération), le CEPED (Centre français sur la population et le développement) et le Département de démographie de l’Université de Montréal. Ce livre de référence est intitulé Trois générations de citadins au Sahel : trente ans d’histoire sociale à Dakar et à Bamako, Paris, L’Harmattan, 1998, 290 p. (Collection « Villes et Entreprises »).

Abdoulaye-Bara Diop a marqué un intérêt soutenu en faveur de la comparaison internationale, de la recherche empirique de terrain et de l’analyse biographique en l’occurrence. Il s’est déployé au-delà de sa discipline. Sa carrière remarquable est jalonnée par des études novatrices au croisement de la sociologie, de l’anthropologie, de l’histoire, de la géographie et de la démographie. Son intérêt pour la démographie a été permanent. Voilà pourquoi il a dispensé des enseignements à l’IPDSR (Institut de formation et de recherche en population, Développement et Santé de la reproduction), alors qu’il avait déjà pris sa retraite de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar.

Des études magistrales sur la société et la famille wolof 

On retiendra du Pr Abdoulaye-Bara Diop les œuvres monumentales que sont : La société wolof, les systèmes d’inégalité et de domination, Paris, Karthala, 1981 et La famille wolof. Tradition et changement, Paris, Karthala, 1985, 262 p. Le premier livre traite notamment des castes, ordres monarchiques et de la société religieuse confrérique. Il y explique, entre autres, les conditions d’émergence du système des confréries religieuses. En conséquence, il a été sollicité pour participer, avec Christian Coulon et Donal Cruise O’Brien, à la présentation critique du livre de Jean Copans (Les marabouts de l’arachide, Paris, Le Sycomore, 1980), dans le n° 4 de la revue Politique africaine (La question islamique en Afrique noire, décembre 1981 : 111-121).

Ses travaux sur la famille wolof traitent successivement de la parenté (structure, terminologie, système d’alliance, comportements), des cérémonies matrimoniales (de l’organisation traditionnelle et des changements socio-économiques), de la polygamie et du divorce. Il a mis au point une méthodologie à la fois descriptive et analytique du système de parenté et d’alliance avec une terminologie d’une grande précision. Il a surtout mis en évidence les changements et problèmes d’adaptation qui se posent à la société wolof et les effets de la très rude domination du pays par le système capitaliste. C’est ce qui l’avait amené à insister sur la nécessité de rechercher une autre forme de développement mettant l’intérêt des paysans au centre de ses préoccupations et dont ils seraient, eux-mêmes, partie prenante. 

On se souvient encore de la chronique bibliographique établie par l’un de ses collègues, un théoricien hétérodoxe, très attaché au Sénégal : « Ce travail est important à plus d’un titre : à cause de la place des Wolof dans l’histoire des sociétés sénégambiennes et sénégalaises d’abord, mais surtout parce qu’il s’agit là de la première étude d’ensemble, sociologique et ethnologique, sur cette population (ce qui par ailleurs est tout à fait paradoxal). Ce travail est également décisif en ce qu’il allie travail de terrain (recueil de traditions orales et de questionnaires sociologiques) et travail de relecture de la littérature disponible » (voir Politique africaine, n° 4, La question islamique en Afrique noire, décembre 1981 : 137-138).

D’autres travaux d’A.-B. Diop ont été consacrés à la tenure foncière en milieu wolof ou à la formation de la nation au Sénégal. Boubacar Barry, l’auteur du remarquable ouvrage Le royaume du Waalo. Le Sénégal avant la conquête, a célébré la richesse exceptionnelle du travail de Diop, notamment en ce qui concerne « l’évolution de la tenure foncière sous le lamanat et la monarchie jusqu’à nos jours ». A.-B. Diop s’est également intéressé aux paysans du bassin arachidier, notamment à leurs comportements de survie au début de la mise en œuvre des programmes d’ajustement structurel qui ont affecté durablement l’économie et la société sénégalaises.  Un homme de méthode, de rigueur scientifique et morale.

Abdoulaye-Bara Diop a marqué des générations de sociologues et d’anthropologues. Il leur a notamment appris que le succès d’une recherche dépend de sa préparation, de sa bonne planification, mais aussi des références théoriques solides qui la soutiennent et l’orientent. Connu pour sa grande rigueur intellectuelle, il a enseigné à ses étudiants les fondements et les exigences du métier de chercheur. Il leur a surtout montré que l’excellence est le fruit de l’épreuve, de l’apprentissage organisé et patient de la méthode, de la mise à jour des connaissances théoriques. Les recherches rapides, ponctuelles et portant sur des objets circonstanciels peuvent, en effet, conduire à des conclusions superficielles. Le succès de l’œuvre d’A.-B. Diop est le fruit d’un patient travail de méthode et de créativité scientifique. Dr Arame Fal, chercheure également à l’IFAN et éminente linguiste, a, sans doute, joué un rôle important dans la grande précision de la terminologie linguistique adoptée dans les publications de ce brillant chercheur. 

Abdoulaye-Bara Diop a organisé, du 27 février au 3 mars 1989, une rencontre internationale destinée à célébrer le cinquantenaire de l’IFAN, un Institut qui fut prestigieux et qu’il a tenté de redresser de toutes ses forces pour l’inscrire à nouveau dans la trajectoire définie par Théodore Monod, son fondateur. Ce symposium a marqué la mémoire de l’Institut par la qualité des participants et des contributions (voir la présentation qu’en font E. Le Bris et Christian Coulon dans Politique africaine, 34, juillet 1989, États et sociétés nomades :133-135). 

Abdoulaye-Bara Diop a fait partie des enseignants et chercheurs, venant de toute la sous-région ouest-africaine, qui ont marqué l’institution universitaire du Sénégal durant les années 1960 et 1970. Ces enseignants et chercheurs bien formés et recrutés avec rigueur ont rendu l’université attrayante pour les jeunes de la sous-région, malgré la vigueur du syndicalisme étudiant de l’époque. Ils constituaient une élite prestigieuse et respectée.

Le professeur Abdoulaye-Bara Diop a donné à plusieurs étudiants et chercheurs l’inspiration et la force leur permettant de produire des savoirs originaux sur les sociétés africaines. Son territoire de prédilection a toujours été l’université. Malgré son âge, il n’avait pas arrêté la quête du savoir. Il continuait à travailler sur un grand projet éditorial dédié à la nation sénégalaise. 

Figure intellectuelle majeure du Sénégal contemporain, A.-B. Diop a aussi fait partie de ses grandes figures morales. Comme cela a été dit à propos d’autres universitaires et nationalistes ayant marqué l’histoire des idées de notre pays, personne n’a pu le corrompre et encore moins le « capturer » pour domestiquer sa pensée. Abdoulaye-Bara Diop était un homme intègre. Il symbolisait une forme élevée de la noblesse morale. Il était surtout un homme libre. Voilà pourquoi il mérite d’être célébré par ses collègues universitaires.

Les contributions souhaitées

La démarche retenue est d’encourager des contributions (témoignages et articles) s’inscrivant dans le creuset de la riche et exceptionnelle production scientifique d’Abdoulaye-Bara Diop et privilégiant une démarche réflexive organisée autour de ses principaux thèmes de recherche. Une façon de célébrer son œuvre scientifique remarquable.

Chaque témoignage ne devrait pas dépasser une dizaine de pages. Les autres contributions souhaitées seront axées principalement, avec une démarche très réflexive et si possible hétérodoxe, sur les principales thématiques qui structurent le travail intellectuel d’A.-B. Diop, sur les stratifications sociales, sur l’anthropologie ou la sociologie en Afrique, sur la problématique de la nation, sur l’histoire de l’IFAN ou celle de la Faculté des Lettres et Sciences humaines, mais aussi sur des questions sociales ou politiques importantes relatives au Sénégal contemporain.

Les contributions ne devront pas dépasser 30 pages en interligne simple, y compris la bibliographie. La police recommandée est Times New Roman, corps 12. Les notes de bas de pages seront traitées en Times New Roman, corps 10. 

Les sources des tableaux éventuels seront clairement indiquées. Les graphiques seront livrés en noir et blanc. On fera un usage modéré des tableaux et des autres sources annexés à chaque contribution.

Les photos ou illustrations proposées devront être de bonne qualité et pouvoir être publiées en noir et blanc. Les cartes seront présentées dans un format standardisé, avec les indications habituelles (échelle, légende, sources, sigles et trames). Une police de caractère unique doit être utilisée pour toutes les cartes, en veillant à laisser les noms lisibles. Les couleurs ne seront pas utilisées. Les photos, illustrations, cartes devront être fournies aux éditeurs à part le texte, en fichier séparé.

Chaque contribution comportera des subdivisions avec des titres et sous-titres courts en minuscules. La hiérarchie entre les différents niveaux de titres doit être très claire.

Les citations sont placées entre guillemets doubles et insérées dans le corps du texte, lorsqu’elles sont courtes. Si elles atteignent au moins quatre lignes, elles sont placées en retrait. Toute citation, directe ou indirecte, doit être référencée.  

Les citations de seconde main ne sont pas admises

Les références sont incorporées dans le texte, selon le système auteur-date sans ponctuation, entre parenthèses, comme suit : 

(Fall 1980) et, en cas de renvoi à la page : (Fall 1980 : 118) ou (Fall 1980 : 117, 120, 130). 

Dans le corps du texte, le nom est présenté en minuscules, à l’exception de l’initiale en majuscule : Vernant ; Vidal-Naquet ; Diop.  

Les notes de bas de page seront numérotées de façon continue. Il est conseillé d’éviter l’excès de notes (en nombre ou en longueur).

Les majuscules ne seront utilisées que pour les initiales du nom et du ou des prénoms. Chaque contribution sera accompagnée d’un bref résumé et d’une liste des sigles et abréviations utilisés. Il est demandé de ne pas mettre de point ni d’espace après chaque lettre (exemple : ANSD et non A. N. S. D.). Les sigles seront écrits en capitales lorsque les initiales se prononcent séparément (ANSD, CNRS), mais avec les seules lettres initiales en majuscule lorsque le sigle se lit comme tel (Isra, Orstom, Unesco).

Une bibliographie sera attachée à chaque contribution, et devra être présentée comme suit. 

Présentation bibliographique (dans l’ordre alphabétique, uniquement)

1) ouvrages imprimés, à présenter comme suit, à l’exclusion de toute autre mention 

a) ouvrage en 1 vol.

FOURNIER, N. (1998). Grammaire du français classique. Paris : Belin. 

b) titre générique d’un ouvrage et titre propre d’un volume 

GURVITCH, G. (1969). La vocation actuelle de la sociologie, t. 1, Vers la sociologie différentielle. Paris : PUF. 

c) contribution à un ouvrage collectif 

THILMANS, G. (1997). « Puits et captiveries à Gorée aux XVIIe et XVIIIe s. » : 107-120, 5 ill., in : D. Samb (ed.) Gorée et l’esclavage. Dakar : IFAN Ch. A. Diop. 

2) Mémoire ou thèse (norme AFNOR Z44-050, simplifiée)

NGOM, P. M. (1995).- Caractérisation de la croûte birimienne dans les parties centrale et méridionale du supergroupe de Mako.- Th. État : Géol. : UCAD de Dakar.- 243 f. 

3) Article 

CASTER, F. (1964). « Les réseaux modernes », Géographie urbaine XII (9) : 234-289, 11 fig., 3 ill., 1 carte. 

Les contributions sont à envoyer à : publications.ifan@ucad.edu.sn et seront publiées dans le Bulletin de l’IFAN, série B, LXI (1-2) 2022

Date limite de soumission : 31 Juillet 2022 

Responsable du volume : 

Pr Abdou Salam FALL 

Responsable de la formation doctorale « Sciences sociales appliquées au Développement »  ETHOS, UCAD

Coordinateur du Laboratoire de Recherche sur les Transformations économiques et sociales 

(LARTES-IFAN), Institut fondamental d’Afrique noire (IFAN)

Distinction Dr Fatou Sow : L’IFAN salue une ancienne pensionnaire, pionnière du féminisme africain

Le 18 mai, l’Université de Bayreuth remettra de manière festive au Dr Fatou Sow le doctorat honorifique BIGSAS. Avec ce prix, la sociologue sénégalaise Dr. Fatou Sow – basée à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar et au Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) à Paris – est reconnue pour son engagement indéfectible à la cause des femmes et ses remarquables travaux d’érudition. réalisations dans les sujets féministes sur le continent africain. Sow est une véritable pionnière des études de genre et du féminisme africain, qui a travaillé à la pointe des droits des femmes en Afrique de l’Ouest et au-delà pendant plus d’un demi-siècle.

Le prix a été annoncé pour la première fois lors de son discours liminaire à la conférence Africa Multiple Cluster of Excellence le 14 juillet 2021 et sera désormais célébré de manière festive le 18 mai de cette année.

La cérémonie aura lieu sur le campus, mais peut également être suivie en ligne. Veuillez vous inscrire à l’un ou l’autre des formats d’événement en visitant  https://bigsas-award-ceremony.wr-events.de/

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